LA NOUVELLE RUBRIQUE DU BLOG
Publié le 11 Décembre 2022
Chers amis,
Il est possible que depuis toutes ces années, on me considère jusqu'à présent pour un homme d'écriture et un coloriste, exclusivement occupé de livres, de couleurs et de pinceaux, ayant pour unique souci de conclure un chapitre et de mener à bien un billet, la tête plongée dans mes stylos et ma palette de couleurs ?
Peut-être, vous aura-t-on susurré au creux de l'oreille que j'avais aussi d'autres préoccupations et que sous le blogueur, le peintre, l'écrivain, le jardinier, le rêveur, il y avait aussi un amoureux de l'assiette un tantinet gourmet et que mon atelier communiquait directement avec la cuisine ?
Et bien, chers amis, on vous aura dit la vérité !
Depuis l'enfance, chez Marceline et Louis, je porte un tendre intérêt aux choses de l'assiette et du verre et j'ai gardé ce goût pour l'authentique : légumes frais du jardin, volailles bien nourries, fruits de saison et bons vins. Je n'en rougis pas, au contraire et je garde le souvenir de cette « tarte aux pommes pour moi tout seul » qui m'attendait sur le coin de la cuisinière.
Il y avait peut-être en moi dès cette jeunesse une place pour deux poésies, celle de l'âme et celle des sens. Ne voulant chasser l'une au bénéfice de l'autre, j'ai tenté d'œuvrer à leur conciliation et à leur bonne harmonie.
Je me flatte d'aimer et d'essayer de comprendre la nature et la riche vie de nos terroirs. Je les ai décrites. Ouvrez mes livres, lisez mes articles, vous y retouverez un nombre suffisant de fleurs, d'oiseaux, de champs, de haies, de sources claires et de ruisseaux jaseurs. La rêverie ne m'est pas étrangère, au cœur du potager ou le long des chemins creux mais il me plaît aussi d'arrêter mon regard sur les splendeurs d'une table magnifiquement servie et décorée.
En fait, pour être honnête, je ne vous aurais pas tout dit !
Si je sais juger de la qualité d'une préparation et me régaler de bons plats longuement mijotés, et bien qu'ayant été qualifié de roi de la crème anglaise, je n'ai pas ce talent béni des dieux de la préparation, alchimie subtile entre aliments, sauces, épices et cuisson qui ravissent le palais.
Alors, me direz-vous, quel est le secret et qui est l'alchimiste ?
Elle s'appelle Catherine Gilles et nous avons quelques années de vie commune derrière nous.
Catherine devait avoir 6 ou 7 ans quand elle a réalisé ses premières pommes de terre sautées chez sa grand-mère paternelle à Marly-le-Roi, Marie Gilles, d'origine cauchoise, qui a géré pendant de nombreuses années, une pension de famille, rue des Feuillantines à Paris. Depuis, l’odeur et le gazouillis des pommes de terre dans la petite poêle à oreilles en laiton sont toujours aussi présents dans sa mémoire.
Chez sa grand-mère maternelle, Augustine Leborgne, morbihannaise, elle adorait faire des bouillies au chocolat dans une jolie petite casserole avec une cuillère en bois toujours en sa possession.
Catherine est née dans une famille multiculturelle : un grand-père génois, Edoardo Dabbene, qui a rejoint son oncle Ortelli installé à Cannes dans les années 1890 et une aïeule juive polonaise sous Napoléon 1er.
Dans la famille, la vie sociale passait par la table. Grands-parents, père et mère s’entendaient tous très bien à faire chanter les casseroles. Elle en a gardé quelques traces dans ses gènes....
La table a toujours été liée à des moments privilégiés et chaleureux de partage. Il n’était pas rare qu’un apéritif se transformât en un dîner impromptu autour d’une omelette aux fines herbes, baveuse à souhait, exécutée par son père qui savait la faire comme personne !
Avec le recul, on s’aperçoit que tout ce que nous faisons et vivons dans notre vie est relié à un fil conducteur.
Nous avons passé nos premières années de mariage au fin fond broussard d’un pays tropical où nous recevions deux fois par semaine à déjeuner le pilote de l’avion qui nous apportait le ravitaillement. Souvent accompagné de visiteurs annoncés pour 3 le matin par radio à 7 heures, ils devenaient 5 ou 6 au fil des heures.
Notre table était reconnue. Catherine s’adaptait, réactive elle faisait preuve d’imagination dans l'urgence : excellente école !
Nous passions nos commandes alimentaires d’une semaine sur l’autre, il fallait prévoir, construire et imaginer les futurs repas. Parfois, faute d’approvisionnement, il arrivait que nous manquions de pommes de terre ou d’autres aliments. Aidée par son cuisinier, Jean-Marie, elle a alors commencé à créer des recettes originales liées à la « bonne fortune » de son placard qui régalaient les visiteurs.
De retour en France, elle a accueilli des étudiants du monde entier qui partageaient notre vie de famille tout au long de l’année. Chaque soir, pendant vingt ans, elle a innové en s’adaptant à certains régimes (végétariens entre autres) en mettant son point d’honneur à dresser une jolie table avec une belle nappe, des bougies, un bouquet de fleurs.
Quand mon diabète s’est invité à notre table, elle a continué dans ce même esprit fait d’adaptation, de remise en question et de créativité prouvant ainsi que l’alimentation du diabétique n’est pas synonyme de privation, de frustration ni de tristesse.
Elle souhaitait par-dessus tout que la vie continue et que la table reste associée au mot « plaisir ». Il y a maintenant 16 ans que la maladie a fait son entrée et même si d'autres soucis ont fait leur apparition, le bonheur de la table est resté intact.
La nouvelle rubrique du blog sera gastronomique !
Pendant notre temps d'activité professionnelle, nous avons parcouru la Normandie et les différentes régions du val de Loire, des rudes monts d'Auvergne aux plaines fertiles du jardin de la France jusqu'à l'Océan. Nous en avons fait « Loire, Terroirs gourmands » et « Mes Recettes Normandes » avec anecdotes, histoires gastronomiques et recettes.
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Pour le blog, j'ai soumis à Catherine de reprendre cette idée et de vous proposer régulièrement, une fois par mois, une chronique gastronomique régionale accompagnée d'anecdotes, d'histoires originales, de billets d'humeur et de recettes.
Catherine et moi ne sommes pas tourmentés par l'ambition d'entendre tinter nos noms à l'heure des repas et les billets de ce blog ne veulent ressembler qu'à de simples moments de partage comme un déjeuner entre amis. A défaut de renom poétique, si difficile à conquérir, nous nous contenterons avec reconnaissance d'un peu de gloire littéraire et culinaire.
Tout simplement, mes mots qui racontent la riche vie des terroirs avec leurs traditions, le sens de la créativité et de l'improvisation de Catherine qui parfois me laisse « baba », prouvent, au quotidien, que quelle que soit la situation, le plaisir de l'assiette est d'une importance quasiment vitale.
Balzac ne disait-il pas : « On ne dîne pas aussi luxueusement en province qu'à Paris mais on y dîne mieux. Les plats sont médités, étudiés. Au fond des provinces, il existe des Carême en jupon, génies ignorés qui savent rendre un simple plat de haricots digne d'un hochement de tête...»
Alors, Rendez-vous en janvier !
A « tout seigneur tout honneur », la première de cette nouvelle rubrique démarrera en janvier avec la Vallée du Loir, pays de Ronsard.
Pour vous mettre en appétit, deux recettes « l'omelette aux herbes du moment » et la « tarte pour moi tout seul »
* OMELETTE AUX HERBES DU MOMENT *
Battre les œufs rapidement (sans trop) à la fourchette dans un bol avec du sel et du poivre. Faire fondre 1 c.c. d’huile d’olive dans une poêle antiadhésive qui permet de réduire l’usage de matière grasse. Verser les œufs (2 à 3/pers selon votre appétit), les décoller du fond de la poêle et la remuer légèrement pour faire cuire l’omelette de façon régulière. A noter : selon la saison, l’omelette peut se manger chaude ou froide. Ajouter des herbes différentes pour varier selon votre goût (fine herbes, basilic, coriandre...).
Peler 800 g de pommes de terre, les passer sous l’eau, les découper en rondelles et les essuyer dans un torchon. Chauffer 2 c.s. d’huile d’olive dans une poêle et y faire revenir les pommes de terre. Elles doivent dorer. Ajouter 2 gros oignons doux (les rouges peuvent convenir) coupés en fines rondelles, les mélanger aux pommes de terre jusqu’à ce qu’ils dorent légèrement. Se sert chaud ou froid en été avec une salade de saison. Peut se découper en petits cubes pour l’apéritif.
* TARTE AUX POMMES POUR MOI TOUT SEUL *
Préparer une pâte sablée avec 200 g de farine, 100 g de beurre, 1 œuf, 1 pincée de sel, 1 c.s. de sucre de canne, 2 c.s. de noix moulues. Former un sable grossier entre vos doigts. Verser un tiers d'une chope de lait et ramener la pâte en boule.
L'étaler sur une feuille de papier sulfurisé en la farinant légèrement pour éviter au rouleau de coller. Appliquer une tourtière à l'envers pour 8 personnes pour marquer légèrement le diamètre du plat et découper la pâte à 2 cm des bords extérieurs. Marquer des découpes de 2 cm de hauteur par rapport au bord et faire se croiser les lanières comme une tresse.
Faire glisser la feuille de papier sulfurisé avec la pâte sur la tôle d'une lèchefrite. Battre 1 jaune d’œuf avec 1 c.s. d'eau et badigeonner le tressé du pourtour (terminer par le fond s'il en reste). Réserver.
Éplucher 4 à 5 pommes selon leur taille.
Les râper avec les gros trous d'une râpe manuelle. Les mélanger avec le jus d'un 1/2 citron, ajouter 2 c.s. de sucre de canne et 2 c.s. de noix moulues.
Fondre 40 g de beurre dans un wok, ajouter les pommes. Les cuire 10 mn en mélangeant. Verser les pommes sur la pâte et enfourner 45 mn à 180°.
Se déguste tiède ou froid.
c.s. : cuillère à soupe
Bonne semaine à toutes et tous !