FLEURS ET PLANTES CELEBRES : LE CAMELIA

Publié le 28 Mars 2022

« Si la vie n'est qu'un passage, sur ce passage au moins semons des fleurs. »

Michel de Montaigne

Souvent intimement mêlées à la grande et à la petite histoire, à la vie artistique et littéraire, aux événements politiques même, certaines fleurs ont accompagné l'humanité dans ses tribulations et ses vicissitudes.

J'aime les fleurs, tout le monde aime les fleurs !

Quand le printemps s'avance, le front couronné de lilas, que les prés ont revêtu leur manteau de verdure constellé de pâquerettes et que les bourgeons s'entrouvrent sous les tièdes haleines d'avril, ne dirait-on pas que la nature s'éveille pour la première fois à la vie, et qu'elle laisse échapper de son sein, longtemps fermé, ses trésors de fécondité ?...

Tous les poètes les ont chantées, tous les peuples les aiment et les cultivent.

Dès les temps les plus reculés, les femmes en ornent leurs cheveux, la religion en pare ses autels... Après avoir embaumé le berceau de l'enfant, elles répandent encore leurs suaves senteurs sur la tombe du vieillard !

Les fleurs parlent aux souvenirs.

Toutes ces fleurs ont une origine, une destinée, un langage. Elles agitent des symboles. La mythologie, l'Orient les ont entourées d'une sorte de culte : mille allégories ingénieuses y furent devinées ou inventées. Des artistes, des créateurs les ont utilisées comme emblèmes.

Alors loin des théories botanistes ou d'horticulteurs couronnés, j'ai eu la tentation de vous faire partager en toute simplicité mes découvertes sur les origines, le passé, les anecdotes et le présent de quelques unes de ces princesses des parcs et jardins.

Le Camélia est le premier invité de cette rubrique florale puis nous rendrons visite à l’œillet, l'iris, l’hellébore, le lis, la pivoine, la violette, le coquelicot, le pavot et que sais-je encore ?....

LE CAMELIA

Découvert en Chine au 17ème siècle, le nom botanique de « Caméllia » fut donné par le naturaliste suédois Carl Von Linné pour honorer le travail de Georg Kamel, père jésuite morave et de surcroît botaniste distingué. Le camélia nommé « Tcha », était la fleur favorite des moines et des mandarins. Les graines expédiées prospérèrent en Europe. En France les premiers camélias sont introduits en 1783.

Au domaine de la Malmaison, acheté en 1798, l'Impératrice Joséphine de Beauharnais met la fleur à la mode, la collectionne et en plante des massifs là où c'est possible .

« La foule marchait lentement. Il y avait des groupes d'hommes causant au milieu du trottoir et des femmes passaient, avec une mollesse dans les yeux et ce teint de camélia que donne aux chairs féminines la lassitude des grandes chaleurs. »

Gustave Flaubert - L'éducation Sentimentale.

Le roman le plus célèbre d'Alexandre Dumas fils doit en partie son renom à l'attrait d'un titre prestigieux : « La Dame aux Camélias » publié en 1848.

Il ne s'agit point d'un hasard ni d'un coup de génie heureux. L'infortunée Marie Duplessis (née Alphonsine Plessis à Nonant dans l'Orne) apparaît dans le roman sous les traits de « Marguerite Gautier ». Elle était grande, très mince, noire de cheveux, rose et blanche de visage.

Elle avait la tête petite, de longs yeux d’émail comme une japonaise, mais vifs et fins, les lèvres du rouge des cerises, les plus belles dents du monde. On eût dit une figurine de Saxe. « En 1844, lorsque je la vis pour la première fois, écrit Alexandre Dumas, elle s’épanouissait dans toute son opulence et sa beauté. Elle mourut en 1847, d’une maladie de poitrine, à l’âge de vingt-trois ans ». Elle repose au cimetière de Montmartre où sa tombe est toujours fleurie.

Lionne ravissante, dépensière, croqueuse de fortunes, infidèle et collectionneuse de dandies, elle toussait à fendre l'âme et ne pouvait supporter les fleurs odorantes dont le parfum l'indisposait. Un jour, elle répondit durement à l'un de ses admirateurs Arthur de Varville, qui lui offrait une corbeille pleine de différentes variétés : « si vous croyez que je ferai une exception pour vous, vous avez tort, les parfums me rendent malade. »

De son côté Alexandre Dumas fils écrit : « elle portait toujours des camélias blancs pendant vingt cinq jours du mois et des rouges pendant les cinq autres jours, une excentricité que je signale sans pouvoir l'expliquer. »

Avec sa « Dame aux Camélias », Alexandre Dumas fils narre sa relation (elle fut sa maîtresse de septembre 1844 à août 1845) avec « Marguerite Gautier » (alias Marie Duplessis) sous le nom « d’Armand Duval ». Il en fait ensuite une pièce jouée en 1852 que Sarah Bernhardt interprète plusieurs fois au Théâtre de la Renaissance dans les années 1896-1898 dont l'affiche est réalisée par Alfred Mucha.

En 1853 Verdi s’en inspire pour créer la célèbre « Traviata » où il représente Marie sous le nom de « Violetta Valéry ».

Suivront de nombreuses adaptations au cinéma, à la télévision, au théâtre, à l'opéra, en ballet.

Coco Chanel en fait un de ses emblèmes. Au 31 de la Cambon le camélia est roi. Elle relance la mode du camélia à la boutonnière pour les hommes, dans les cheveux ou en broche pour les dames. « La Dame aux Camélias, c'était ma vie... » dit-elle.

Fleur sans parfum, ni épines, à la géométrie toute en rondeur qui allie mystère et sobriété intemporelle, d'une altière beauté, le camélia est symbole de longévité, mariage heureux, lien amoureux, chance et bonheur.