AU PAYS DU LIN

Publié le 15 Juillet 2018

 

Champ de lin dans la région de Varengeville

 

Cette semaine, nous allons quitter le temps d'un article les rives des vaux du Loir. Ne soyons pas chauvins tous nos terroirs sont magnifiques avec chacun leurs caractères et leurs spécificités. Si mon cœur est très lié à notre vallée du Loir, j'ai une certaine intimité avec une autre magnifique région : la Normandie et plus particulièrement La Haute-Normandie et le Pays de Caux où chaque année se produit un événement particulier, éphémère et d'une étonnante beauté.

 

La fleur de lin

 

L’image traditionnelle de la Normandie nous montre la vache « portant lunettes » sous les pommiers en fleurs, au printemps. Presque à la même époque de grandes étendues se colorent d’une belle petite fleur bleue à cinq pétales. Elle embellit par touches successives les vastes étendues vertes des champs qui ondulent comme du velours au gré du vent.

Elle est éphémère et se fane en cinq heures.

Cette fleur est celle d’une plante connue depuis l’Antiquité, le lin dont la Normandie et notamment la Haute-Normandie est devenue en quelques années le premier producteur européen.

 

Réintroduit dans la région au XXe siècle par les agriculteurs flamands, il est cultivé principalement, en Seine-Maritime (21 500 ha) où le climat humide et les sols riches conviennent bien à cette plante exigeante. Le Pays de Caux est la première région productrice de France avec près de 10 000 ha autour de Doudeville et Luneray. Dans le département de l'Eure (13 600 ha) la culture du lin se concentre notamment sur les plateaux de Saint-André, du Neubourg et en pays d’Ouche. La Normandie représente aujourd’hui 60% des surfaces cultivées en lin textile dont 84% en Haute-Normandie.

Le lin normand est long, fin, résistant et facile à élaborer. Celui du Pays de Caux a acquis une réputation mondiale du fait de sa grande qualité.

On sème le lin à la mi-mars et la plante pousse en cent jours.

 

« C’est juin qui fait le lin », annonce le dicton.

 

 

 

 

La culture du lin, complexe, coûteuse, demande une parfaite maîtrise technique. C’est une plante respectueuse de l’environnement qui consomme peu d’engrais et de produits phytosanitaires.

 

« Quinze jours de mai, quinze jours de juin amènent le lin » dit le proverbe.

 

La récolte a lieu l’été. L’arrachage (le lin n’est pas coupé) se déroule vers la mi-juillet avec des machines conçues pour ce travail. Autrefois il était arraché à la main.

Il est laissé au sol pour rouissage pendant trois à huit semaines pour être ramassé début septembre.

Le travail en usine, le teillage, va d'abord séparer la fibre textile utilisée  en tissage puis en une foule de sous-produits qui deviendront alimentation du bétail, isolants, sacs postaux ou panneaux d’agglomérés.

 

 

Le rouissage du lin

 

 

« Qui a lin a fortune ». dicton

 

Avec 1 hectare de lin on produit :

800 chemises, 1500 chemisiers, 500 jupes, 100 draps, 100 nappes, 100 rideaux, 1000 panneaux de portières automobiles, 200 kg de tourteaux et paillette ( aliment du bétail), 100 litres d’huile de lin pour la peinture.

 

100 kg de paille de lin produisent : 300 m² de paillage écologique, 50 kg d’anas (1) , 15 à 18 kg de lin teillé (2), 15 kg d’étoupes (3) et 6 à 10 kg de graines, le reste constitue des impuretés.

 

La transformation du lin en filasse est assurée par des coopératives linières et des teilleurs privés en Normandie avant d’être exporté en Italie, Europe du nord et Asie car il faut le savoir, il n’existe plus chez nous de filature ou de tissage du lin.

Au XIXe siècle près de 10 000 personnes de la région vivaient des industries textiles et le commerce des toiles était florissant.

 

 

 

 

 

Chaque année en juin et juillet, le temps d’un week-end, le lin est en fête à Routot et dans la vallée du Dun où plusieurs communes se sont associées pour créer le « Festival du lin et de l’aiguille ».

 

On parle lin, on s’habille lin, on défile lin et on peut même manger lin

( biscuits, pain à la graine de lin, charcuterie, pâté ).

 

« Dans le lin tout est bien »  et le célèbre couturier Jean-Charles de Castelbajac confirme en disant :

 

« J’aime le lin pour son odeur, son vêtir, son élégance, son histoire. J’aime le lin, c’est une matière éternelle. »

 

 

 

 

 

1-Anas : parties ligneuses de plantes textiles, principalement le lin situées en arrière de la fibre et réduites au cours de l'opération broyage-teillage en petites particules, constituant un sous-produit utilisé pour la fabrication de panneaux agglomérés, pour l'alimentation d'animaux d'élevage et comme combustible.

2-Teillage : Opération mécanique ou manuelle qui consiste à battre la tige des plantes textiles (lin, chanvre) après rouissage et séchage pour séparer les parties ligneuses de la fibre afin d'obtenir la filasse.

3-Etoupe : sous produit fibreux non tissé issu essentiellement du travail du chanvre et du lin dans le colmatage des interstices entre les planches des bateaux, les mèches de fusil, les joints mécaniques ou la plomberie...

 

 

Croquis Yves de saint Jean

 

Rédigé par Yves de Saint Jean

Publié dans #patrimoine

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